Mars 2007 - n°7

Force de solution. Depuis toujours. Appareils de mesure très précis conçus par Anton Paar GmbH

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La rhéologie : vaut-elle la peine d’être reconsidérée ?

La directrice d’un laboratoire, Melle C., m’appela un lundi matin : elle désirait une offre de prix pour un viscosimètre. Tous les jours, depuis près de dix ans, elle utilisait une machine aujourd’hui quelque peu désuète pour effectuer des mesures à point unique de la viscosité pour un contrôle qualité. La valeur mesurée pour chaque échantillon était inutilisable dans la pratique, mais pour le dossier de tests, une valeur de mesure vaut toujours mieux que rien du tout. Au fil de la conversation, Melle C. prit conscience qu’elle pourrait tirer avantage d’une discussion plus approfondie au sujet de l’application. Ainsi, nous nous rencontrâmes peu après dans le laboratoire de Melle C. et cette dernière souleva bientôt la question :
« Notre société aurait-elle avantage à prêter davantage d’attention aux tests de rhéologie ? »

Introduction

Bien entendu, il n’a pas échappé à Melle C. que la technologie des instruments de mesure a fait de grandes avancées ces dernières années. Elle n’avait simplement pas le temps de parcourir l’énorme flux d’informations auquel elle est confrontée quotidiennement. La finalité de notre petit entretien est de discuter des options de test qui contribuent à l’optimisation de la production et des applications, dans ce cas, des dispersions.
Très vite, tout devient clair : la consistance d’une dispersion ne peut pas être déterminée de manière suffisamment précise en utilisant une seule valeur de viscosité. Nous nous attelâmes donc à l’élaboration d’une liste d’exigences dans laquelle 3 aspects principaux commençaient à prendre forme :
a) Comment pouvons-nous décrire la propriété des flux ?
b) Comment pouvons-nous caractériser l’état au repos ?
c) Que se passe-t-il dans le temps lorsque des changements brusques interviennent entre l’état de flux et celui de repos et vice versa (mot clé : thixotropie) ?
Durant la discussion sur les questions liées à l’application, cependant, Melle C. commençait à comprendre que ses dispersions ne pourraient être correctement spécifiées que si les trois points étaient pris en considération. Ce n’est qu’alors qu’on pourrait obtenir une description complète et bien cernée du produit.

Lois rhéologiques

En faisant appel à la rhéologie, la science du comportement des flux et des déformations des matériaux, nous sommes en mesure d’aller bien plus loin que la simple détermination de la viscosité. Les deux simples formules physiques qui décrivent en essence le comportement rhéologique sont associées aux noms de deux scientifiques anglais des 17e et 18e siècles.
a) Newton, pour le comportement visqueux idéal des fluides : Contrainte de cisaillement = viscosité de cisaillement par taux de cisaillement t (Pa) = h (Pa•s) • ÿ (s-1)
b) Hooke, pour le comportement élastique idéal des solides : Contrainte de cisaillement = module de cisaillement par déformation de cisaillement t (Pa) = G (Pa) • ÿ (1)
La combinaison des deux formules donne une équation différentielle, qui a été baptisée du nom des trois physiciens anglais du 19e siècle, Maxwell, Kelvin et Voigt, et qui décrit le comportement viscoélastique des matériaux réels. Fort heureusement, nous avons aujourd’hui des logiciels permettant de calculer cette équation complexe à notre place – et Melle C. n’est pas la seule à s'en féliciter.

Caractéristiques des flux

En cas de contrainte de cisaillement croissante, la plupart des fluides techniques présentent des valeurs de viscosité à la baisse. Ce comportement des flux est appelé rhéofluidification (également pseudoplasticité). Par conséquent, il est un peu idiot de déterminer la viscosité en utilisant un seul taux de cisaillement. Mais ça, Melle C. le savait déjà. Cependant, lorsque je lui ai montré un diagramme de tests de dispersions similaires dans lequel étaient présentées différentes courbes de viscosité sous forme de diagrammes ÿ - h, qui ont une intersection à une valeur ÿ donnée, elle fut tout de même surprise de voir à quel point les valeurs de mesure pour des taux de cisaillement plus élevés et plus bas peuvent varier.

Ces courbes de viscosité avaient été mesurées tout récemment dans le laboratoire d’un sous-traitant. Pendant des années, dans ce laboratoire, les mesures de contrôle à point unique avaient été analysées pour une valeur ÿ donnée, et bien entendu, une viscosité relativement similaire avait toujours été enregistrée.

Ce phénomène était constant, malgré le comportement clairement différent que présentaient des échantillons individuels dans les étapes de traitement ultérieures, principalement à des taux de cisaillement élevés. Cet exemple persuada une nouvelle fois Melle C. qu’il ne suffit pas de simplement mesurer une valeur aléatoire. Le test devrait permettre de simuler le plus fidèlement possible les taux de cisaillement qui sont en jeu durant l'application.

Pour couronner le tout, il faut également mentionner que certaines dispersions sous haute charge, avec une contrainte de cisaillement croissante, peuvent parfois présenter une viscosité croissante. Cette caractéristique des flux est appelée rhéoépaississement ou dilatance. Une fois de plus, dans ce cas, une seule et unique valeur de viscosité n’est pas appropriée pour décrire les caractéristiques des flux.
Comment Melle C. peut-elle trouver la gamme de taux de cisaillement correcte pour ses tests ? Pour répondre à cette question, nous devons tout d’abord obtenir une description détaillée des applications de la dispersion. Lorsque nous appliquons une couche avec, par exemple, une vitesse de recouvrement v et une épaisseur de couche h, le taux de cisaillement peut être calculé de la manière suivante : ÿ = v/h. Des valeurs supplémentaires du taux de cisaillement peuvent être calculées suivant l’application, ou être trouvées dans la littérature spécialisée
Nous avons conçu pour Melle C. le programme de mesures suivant, pour une courbe de flux en forme de rampe, avec les taux de cisaillement augmentant de ÿ =1...1000 s-1 et pour une durée de test de t = 3 min. Ensuite, en guise d’évaluation, la courbe de viscosité fut comparée à une courbe précédemment déterminée, qui était qualifiée de « bonne » et intégrée dans le programme informatique comme une diagramme standard pour les comparaisons. À ce stade, il est important que l’analyse puisse être réalisée sur la totalité de la courbe de flux.

La discussion se poursuit, particulièrement autour de la limite inférieure de la gamme de mesure des taux de cisaillement. Les restrictions sont les suivantes :

a) La plupart des rhéomètres avec palier à bille, utilisés pour le contrôle qualité, ne sont généralement plus capables de mesurer des substances faiblement visqueuses de manière infaillible à des taux de cisaillement ÿ < 0.5 s-1 parce que leur gamme de couple ou de vitesse de rotation est limitée. Par contre, les rhéomètres avec palier à air sont sensibles pour des valeurs inférieures à ÿ = 1 s-1 pour 3 tailles ou plus.

b) Commentaire destiné à ceux qui souhaitent approfondir le sujet des courbes de viscosité : Les rhéomètres avec palier à air peuvent généralement supporter 5 tailles ou plus de taux de cisaillement avec un seul système et un seul test de mesure. Les valeurs de viscosité à des taux de cisaillement bas ÿ < 1 s-1 sont particulièrement intéressantes pour les départements de recherche et développement. À ce stade, il est possible d’étudier le caractère structurel des dispersions.

La question est : Un plateau avec une viscosité constante (viscosité à cisaillement nul h0) apparaît-il sur le diagramme h-ÿ à l’endroit du taux de cisaillement le plus bas dans une présentation à logarithme double ou ce plateau n’apparaît-il pas, comme c’est le cas avec des substances qui ont des propriétés gélatineuses ?

En ce qui concerne ces tests, il faut noter que plus le taux de cisaillement ÿ est faible, plus le temps de mesure t(mp) doit être long. Une règle empirique pour de nombreuses substances est :

t(mp)= 1/ÿ, ce qui signifie que la durée de mesure doit être au moins un taux de cisaillement réciproque. Ce n’est qu’alors que l’échantillon a suffisamment de temps pour s’adapter aux conditions de faible cisaillement. Dans le cas contraire, on pourrait obtenir une valeur h0 ou même à une courbe de viscosité calculée au maximum, même en substances gélatineuses – qui n’ont toutes deux aucune valeur du point de vue rhéologique. ?

Pour les techniciens d’application, il est intéressant qu’une dispersion avec une viscosité à cisaillement nul h0 au repos coule sous son propre, et dans des tests de longue durée, tende à la séparation. Les résultats de ces tests ne décrivent dès lors pas simplement le comportement de la substance fluide, mais également son comportement en état de quasi-repos. ?

Vous pourrez trouver la seconde partie de cet article dans l’édition du mois d´Avril.

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